– Mercredi 29 mai
Le Parti socialiste et le groupe Socialistes et Apparentés de l'Assemblée nationale,
Le 27 juin dernier, la mort brutale de Nahel Merzouk, un jeune homme de 17 ans, au cours d’un contrôle de police a suscité une vive et légitime émotion dans notre pays. Ce drame a également ouvert un débat sur la question des refus d’obtempérer et de l’utilisation des armes à feu par la police nationale, notamment au regard de la loi du 28 février 2017, qui visait à préciser les conditions d’usage possibles de ces armes par les forces de l’ordre. Le refus d’obtempérer ne peut en aucun cas conduire à perdre la vie.
Dans le souci d’apporter des réponses claires sur la manière dont cette loi a été écrite, diffusée, reçue, comprise et appliquée par les forces de l’ordre, les députés socialistes et apparentés ont demandé la création d’une mission d’évaluation de cette loi. Roger Vicot, député du Nord, en a été nommé co-rapporteur.
Pendant 8 mois, cette mission a multiplié les auditions de policiers, gendarmes, autorités indépendantes, magistrats, avocats et associations professionnelles. 45 auditions ont été organisées, 90 personnes ont été entendues. Ces auditions ont notamment révélé la difficulté d’établir un lien incontestable et manifeste entre les dispositions de la loi du 28 février 2017 et le nombre de tirs par les forces de l’ordre.
Néanmoins, la rédaction insuffisamment claire de l’article relatif aux conditions de l’ouverture du feu par la police nationale en cas de refus d'obtempérer a conduit à une interprétation bien plus large que celle voulue par le législateur de la part des policiers nationaux, y compris de leur hiérarchie.
Une abrogation de la disposition relative à l’ouverture du feu dans le cadre d’un refus d’obtempérer ne nous semble pas être une solution souhaitable. Elle créerait un nouveau flou juridique qui viendrait renforcer la problématique actuelle au lieu de la corriger et constituerait une mise en danger des citoyens français et des forces de l’ordre. Il nous est apparu évident que le solution résidait plutôt dans une nouvelle rédaction de l’article.
Roger Vicot et les députés socialistes et apparentés déposent donc aujourd’hui une proposition de loi visant à mieux encadrer les conditions d’ouverture du feu par la police nationale. Nous proposons de restreindre la possibilité, pour les forces de l’ordre, d’ouvrir le feu aux seuls cas qui représentent une menace manifeste et imminente pour eux-mêmes ou autrui. Cette nouvelle rédaction apporte une sécurité à la fois aux contrevenants se rendant coupables de refus d’obtempérer et aux forces de l’ordre, notamment sur un plan juridique.
Par ailleurs, les auditions réalisées ont systématiquement mis en lumière la question de la formation des policiers à l’usage des armes. Considérant que 40% environ des policiers n’effectuent aujourd’hui pas les trois tirs d’entraînement annuels (déjà très insuffisants), nous proposons d’aligner le régime de la police nationale sur celui de la gendarmerie en interdisant le port d’arme aux policiers n’ayant pas satisfait à leurs obligations en matière d’entraînement.
Enfin, nous proposons de systématiser l’utilisation des caméras-piétons et des caméras embarquées par les policiers et gendarmes, et l’enregistrement en continu des interventions. Ces dispositifs, selon toutes les parties concernées (syndicats, avocats, magistrats), protègent à la fois les citoyens et les forces de l’ordre.
Cette proposition de loi nous apparaît nécessaire pour clarifier le cadre d’intervention de la police dans un contexte de tensions croissantes entre les forces de l’ordre et une partie de nos concitoyens. Elle s’inscrit dans un travail plus large que les socialistes mènent sur les questions de sécurité et de prévention de la délinquance afin notamment de renouer un lien de confiance entre la police et la population dans le cadre d’une Convention Nationale qui rendra ses conclusions à l’automne.